Comment qualifier ce récent 1er mai autrement que de « dies irae » ? Avant que les brins de muguet ne sonnent le jour J, tout avait commencé à clocher à Paris, mais pas que… A Dijon, les professionnels de l’hôtellerie sous l’égide de leur syndicat l’UMIH 21 accusaient, dès le 23 avril, les agents de la Direction du Travail de Côte-d’Or de « pousser le bouchon un peu loin », en interdisant aux restaurants, brasseries ou cafés d’accueillir les Dijonnais ainsi que les touristes. Et ce en dépit d’un article du code du travail qui avait permis dans le passé de « déroger au chômage du 1er mai » et donc d’ouvrir les établissements – avec des salariés volontaires rémunérés le double.
Après avoir écouté attentivement Emmanuel Macron dire à l’issue du Grand Débat qu’il fallait travailler plus (voire même rendre ouvré un jour férié), l’hôtellerie-restauration avait repris l’espoir que la parole présidentielle fasse bouger les lignes . Que nenni ! On imagine donc la fureur de toute la profession alors que les touristes ont afflué, attirés qu’ils sont par la cité des Ducs classée au patrimoine mondial de l’Unesco. Mais qu’est-ce qui peut bien motiver ce coup de frein au commerce local ? Pourquoi ces fonctionnaires vont-ils à contre-courant des intérêts de Dijon, alors qu’ils sont au fait des difficultés économiques que traverse la région ? Résultat des courses : hormis quelques boulangeries et une ou deux supérettes, seuls Mac Do, rue de la Liberté, et La Mie Câline rue Bossuet tenaient… table ouverte!
Il est vrai que ce 1er mai a eu les saveurs de l’amertume : les comparses que furent Gilets Jaunes et Black Blocs ont tenu les rôles principaux dans ce théâtre de l’absurde et de la cruauté, surtout si l’on songe à cette intrusion irresponsable dans le service de réanimation de la Pitié-Salpétrière. Qu’en pensent in fine les acteurs traditionnels de toujours du 1er mai – PC, CGT, CFDT, FSU etc – qui se sont vu confisquer la parole et ont occupé – invitus invitam – le bas de l’affiche ? Philippe Martinez, qui ne passe pas pour un phare de la pensée, est le seul leader syndical à y être allé d’une tirade, dont n’aurait pas voulu Flaubert pour son Bouvard et Pécuchet… Le 1er mai s’est donc achevé sur un tomber de rideau en lambeaux. La faute à qui ? Sans aucun doute à tous ces patrons de syndicats qui, ces années dernières, ont recruté des adhérents dans la fonction publique, chez les cadres moyens, mais peu ou pas parmi les rangs d’une classe ouvrière et populaire en urgence absolue. D’où cette interrogation: notre 1er mai, si laïc et républicain, ne doit-il pas trouver son chemin de Damas?
Marie-France Poirier