Baby sitting pour vieux !

Toutes les générations ont leur prêt-à-penser. Pour celle à laquelle j’appartiens, il se résumait ainsi : « Garde-à-vous ! La sagesse appartient aux vieilles gens ! » A moult reprises, j’ai pu constater l’idiotie de la chose, tant les « vieux » – alias les seniors en langage politiquement correct d’aujourd’hui – peuvent se révéler pas raisonnables pour un sou.

L’adage de ces années 2010/2020, c'est au contraire – usurpons l’héritage de Gilbert Bécaud - le temps « des n'importe quoi, âge tendre et tête de bois. » Bref, je n’en peux plus du culte du jeunisme qui fait tourner la tête à notre chère planète : Greta Thunberg est devenue l’icône que l’on sait. Il n’empêche que sa notoriété me chauffe les oreilles. Son succès mondial est moins dû à l’originalité de sa pensée – rien de nouveau dans son SOS à la planète - que son culot inouï urbi et orbi, et … Et le fait que sa croisade s’inscrit dans notre inconscient collectif comme celle d’une nouvelle Jeanne d’Arc d’un siècle impie.

Un train peut en cacher un autre : même fonds de commerce avec la SNCF, qui vous aiguille sur ses pages de réservation via Internet. Grâce à « son » gamin qui joue les jeunes sioux avec un « chut » difficilement crédible : ledit moufflet veut nous faire croire que l’on est un client privilégié, à qui les « bons plans » sont réservés en exclusivité… Bien sûr, il n’en est rien. Itou pour les publicitaires qui chouchoutent les bébés - mignons et toujours souriants. La représentation du très jeune âge fonctionne dans l’achat de nombreux biens de consommation : aussi bien les détergents que les voitures électriques and co. Le bébé et son grand frère constituent un bel argument publicitaire : chez Renault, c’est justement le frérot de 8/10 ans qui tire le fil électrique de la Zoé City - mais pas les cordons de la bourse - pour alimenter en énergie le mini- bolide. Je persiste dans mon persiflage : quelle leçon de morale hypocrite que de voir un galopin faire le coup de l’apprentissage aux adultes !

Ce n’est là que le début d’un long chapitre. Après sa publicité « coquillette » axée sur la famille moderne et harmonieuse (?) de parents divorcés censée nous caser une cuisine, Ikea nous revient avec une publicité sur la relation mère-fils : on y voit une maman et son fiston dans les allées choisir – tiens encore – une… cuisine. Le tout mitonné avec ce slogan : « Il y a des choses que l'on aimerait ne pas voir grandir ». Si vous n’avez pas saisi le message subliminal du géant suédois selon lequel « les prix restent petits tout l'année », c’est que vous n’êtes pas fichu d’assembler les éléments du placard...

Sur l’autoroute du soleil pour tous, l’ A 16 (comme ados !), vous trouverez bien entendu la Banque Postale et tous les autres organismes de la finance qui proposent l’ouverture de comptes ou livrets, dès qu’on entre en maternelle. Mettez un jeune tigre dans le moteur de la pub ou celui du climatiseur de la planète, et vous vous tapez les leçons dispensées aux vieux de 40 ans +++ par des jeunes de moins de 10 ans d’âge…

Ah ! Ma chère Greta Thunberg, vous, la sainte ado du babysitting des seniors, on vous adore.

Marie-France Poirier