A Dijon, l’art ne se cache plus

En avant-première de la réouverture… en majesté du Musée des Beaux-Arts le 17 mai prochain, le top-départ vient d’être donné par l’opération « hors les murs » d’œuvres appartenant à ses collections permanentes.

Dès février et au cours du mois de mars, le musée des Beaux-Arts installe ainsi « un printemps de l’art » dans plusieurs endroits de la cité. C’est un événement majeur à portée nationale et internationale. Et cette restauration du Musée dans le cadre exceptionnel du palais des Ducs de Bourgogne ainsi que la refonte totale de sa muséographie font dire à Christine Martin, adjointe aux affaires culturelles : « Nous allons avoir la chance infinie, le privilège inouï de redécouvrir un musée des Beaux-Arts dans des conditions optimales telles qu’aucune des générations précédentes n’a pu le voir. Nous entendons privilégier une politique culturelle d’ouverture totale : tout visiteur aura ainsi le loisir de contempler les toits, les monuments, le square des Ducs depuis l’intérieur. De même en multipliant accès, ouvertures sur les rues et principalement sur la Place de la Sainte-Chapelle, nous incitons le public à en franchir le seuil. Notre opération d’art « hors les murs » revêt donc une symbolique toute particulière.»

Les Galeries La Fayette accueillent la Vache que Samuel Buri a créée dans les années 70, et qui appartient à la Donation Granville. Faite à partir d’un moule en résine, elle est ornée de motifs paysagers peints à l’acrylique, où figurent précisément des… vaches. Par-delà l’École de Barbizon dont elle est une résonance, la Vache de Buri « pâture » dans le pré-carré du Pop Art et annonçait alors les mouvements de l’art et de l’écologie.

La Vapeur, elle, accueille deux sculptures du grand artiste d’origine hongroise Étienne Hajdu (dit aussi Hadju) : Célébration Solaireet Tête Rose. Proche de Fernand Léger ou des peintres Arpad Szenes et Vieira da Silva, dès sa jeunesse Hajdu a trouvé au cours de balades à bicyclette dans la campagne bourguignonne une source d’inspiration puissante. C’est ainsi que la découverte, puis la passion pour l’architecture de la Cathédrale d’Autun ont fait évoluer ses sculptures dans une dimension plus transcendantale et une quête spirituelle.

Un train n’en cache pas forcément un autre. Surprise donc, au milieu de la rotonde de la gare, où les usagers SNCF et les esprits curieux ont tout loisir de regarder (sans l’enfourcher bien évidemment) le vélocipède fou, déjanté et surréaliste de cette création due à cet artiste naïf que fut le Père Gaston-Gérard Pascual. Il s’agit de sa Véloterieen fer et peinture acrylique qui fit débat et fit pédaler dans la semoule les critiques d’art des années 1980. Depuis, la Véloterie fait quasi figure d’œuvre classique au même titre qu’un Arcimboldo !

Aristocratie de l’hôtellerie oblige, le prestigieux établissement de La Cloche aura pour clients de prestige un Rodin et un Yencesse. Il s’agit respectivement de L’Age d’airainet de Diane au Rocher. On ne présente plus Rodin dont tout le monde admire la puissance créatrice immense. Quant au Dijonnais Hubert Yencesse, décédé en 1987, il appartient à une dynastie de grands artistes. Son père, Ovide, médailleur illustre, lui avait fait rencontrer le sculpteur François Pompon, dont il devint l’élève. Il a exposé pour la première fois au Salon d’automne en 1921 à Paris. Entre autres et grandes œuvres, il a sculpté le profil gauche de l’aviateur Georges Guynemer, pour un bronze destiné à orner la façade d’un monument érigé sur l’ex-terrain d’aviation militaire à la mémoire du grand pilote.

Marie-France Poirier