Il est l’un des artistes les plus renommés de Côte-d’Or, son « bestiaire imaginaire » dépasse même nos frontières et traverse les océans pour s’exposer sur d’autres continents. Michel Couqueberg fête en 2018 quatre décennies de passion, de création, et dévoile ce 23 septembre une exposition nommée « 40 ans de sculpture » à Orgeux, l’occasion pour Dijon l’Hebdo de revenir sur une belle carrière qui débute à Dijon en 1978.
Enfant, Michel Couqueberg s’armait d’un simple crayon pour exprimer toute l’étendue de son talent. L’art, la création, ont en effet toujours occupé une place de choix dans le quotidien de cet autodidacte. Il n’a jamais cessé de dessiner, c’est ainsi que toutes ses œuvres naissent, sur le papier, mais il a un jour décidé de donner vie à ses croquis en les façonnant. Ses sculptures étaient déjà inspirées de la nature, des arbres, des animaux, des mouvements de la mer. Ses débuts se font dans une cave à Dijon, où il sculpte ses premières œuvres dans le bois, avec pour seule ressource son imagination. Il garde d’ailleurs précieusement, dans son atelier actuel, les outils qui ont marqué l’aurore de sa vie d’artiste. En 1998, il quitte et vend sa maison, au coeur de Dijon, pour s’installer à Orgeux. Tout reste à faire, seul un immense bâtiment, sans même l’électricité, trône au milieu d’un terrain vague. Très méticuleux, Michel Couqueberg se construit, au fil des mois, « son nouvel environnement », selon ses mots. A chaque espace de cet atelier correspond une étape de l’élaboration de son bestiaire. Ici, tout est pensé pour répondre à l’organisation sans faille de l’artiste, il a chiné chacune des pièces qui meublent son espace de création chez les ferrailleurs de la région.
Un artiste complet
Il faut dire que Michel Couqueberg a choisi de ne rien laisser au hasard, de ne permettre à aucune autre main de toucher ses créations uniques. En admirant les 40 années de sculpture qui emplissent son atelier, il faut imaginer l’ampleur du travail accompli, du dessin au polissage. Il se plait à observer les animaux, leurs attitudes, statiques ou dynamiques, pour retranscrire, sur le papier, l’élégance avec laquelle ils occupent l’espace. Ces courbes, ces mouvements, sont ensuite modelés dans le plâtre, puis les sculptures patientent parfois plusieurs mois sur les établis. Le sculpteur se laisse le temps de la réflexion, il attend un déclic avant de choisir d’agrandir son esquisse pour en faire une œuvre monumentale, ou un moulage afin que le bronze remplace le plâtre. L’oeuvre quitte alors les mains de son créateur pour rejoindre la fonderie d’art Deroyaume, seul sous-traitant auquel Michel Couqueberg confie son travail, depuis 40 ans. De retour dans son atelier, il travaille alors cette pièce de bronze brute, il la cisèle lui-même, pour ne pas trahir les lignes, pour lui, ce serait comme « changer la partition d’une mélodie ». Il n’est pas seulement artiste, mais aussi artisan, fondeur, soudeur, parfois même chimiste… Après le polissage vient le moment de sublimer la sculpture avec une patine qui saura la mettre en lumière et rendre ses courbes plus intenses encore.
Moderne et intemporel
Résolument moderne, il conçoit l’art comme un élément ancré dans son époque et s’impose d’évoluer au fil des années. Il y a deux ans et demi, il adopte une nouvelle technique de coloration. Nommée KooKyKrom, elle dote les sculptures de couleurs puissantes, profondes, parfois dégradées et de multiples reflets. Michel Couqueberg entretient bien sûr le mystère qui plane sur cette méthode des plus contemporaines dont seuls 4 artistes en France détiennent les secrets. Ses sculptures sont elles aussi pleines de secrets, si certains symboles sont reconnaissables au premier regard, c’est en observant longuement ces pièces uniques que l’on perçoit leur face cachée. Loin d’être figuratif, l’art de ce sculpteur dissimule de nombreuses références à l’eau, au mouvement, à la mélodie ou au temps. Michel Couqueberg est depuis toujours moderne, intemporel, fidèle et c’est probablement la raison pour laquelle on ne peut distinguer ses œuvres les plus anciennes des plus récentes. Son premier éléphant ou son sanglier, datés de 1998, n’ont en effet rien à envier à ses dernières créations et peuvent même aujourd’hui s’offrir un coup d’éclat, grâce au KooKyKrom.
Admirer le chemin parcouru
Intronisé au Chapitre des Arts, membre de la Maison des Artistes de Paris, designer pour la faïencerie de Charolles… son parcours est vertigineux. En 40 ans, Michel Couqueberg a reçu nombre de distinctions, mais s’attache à la symbolique de sa plus belle réussite : l’apparition de ses œuvres dans Le Dictionnaire des artistes animaliers de l’antiquité à nos joursde Hachet en 2004, une véritable bible pour les galeristes et amateurs d’art. L’heure n’est pas au bilan pour cette exposition, mais à la célébration de 40 années de sculpture et de travail, des grands succès qui ont ponctué et ponctueront à l’avenir sa remarquable carrière. Aucun lieu n’aurait pu mieux accueillir cet événement que son atelier, cet espace de création dans lequel on découvrira, ou redécouvrira, dès le 23 septembre, le bestiaire imaginaire de Michel Couqueberg. L’occasion d’entrer dans les coulisses, de percer les secrets d’oeuvres monumentales, d’admirer le chemin parcouru par l’artiste et de partager sa passion avant de contempler, dans les deux salles d’exposition, les 40 sculptures KooKyKrom qui symbolisent ce bel anniversaire. Les animaux y sont rois, leurs courbent ne manquent d’ailleurs pas de rappeler l’élément privilégié du sculpteur, l’eau. Il a aussi rendu hommage au savoir-faire régional dans une œuvre nommée Cep, un cep de vigne dont les lignes et les couleurs suggèrent la déclinaison des célèbres Climats de Bourgogne. Et pour rendre ce moment inoubliable, un magazine inédit dédié à cette exposition exceptionnelle, dans lequel le sculpteur commente lui-même son art a été imprimé. Les amateurs d’art et de design pourront même s’offrir une reproduction en faïence de Charolles afin d’emporter chez eux un peu de ce bestiaire imaginaire…
Léa Chauchot