A vos marques, prêts, bronzez ! Seins des femmes, pectoraux des mecs avec vue sur la mer, ventres rentrés en totale introspection, cet été, mesdemoiselles, mesdames et messieurs, vous allez faire monter la température ! Il n’empêche que cette mise-en-chauffe n’a rien de facile-facile, car il va falloir se surpasser pour réparer les dégâts occasionnés par un laisser-aller datant d’une bonne décennie. Voire plus.
Ne perdons pas pied, et tâchons de réveiller le champion (la championne) qui sommeille en nous. Comment se glisser en effet, sans capitons de cellulite dans des bikiniminis dénommés très explicitement « push-up », avec armatures et bonnets fortement paddés (sic) qui maximisent la poitrine et rendent le décolleté plus généreux ?
Si l’on s’en réfère aux catalogues et aux revues de mode, l’été 2018 se pense, se vit en bretelles tour de cou et maillots de bain bandeaux minimalistes qui ne cachent rien. En ville, c’est le règne du short avec collant noir (!), que l’on accuse ou non 10 ou 15 kilos de trop. Ou encore le Marcel pour les quadras chauves et en pleine expansion abdominale. Bref, « la vraie vie des vraies gens » se découvre grâce à ces biscoteaux qui ont tant inspiré Botero ou le peintre bourguignon trop méconnu que fut Camille Bombois.
Nous nous situons – pour la majorité – à contre-courant des canons définis par Luxury Style Magazine, Grazia, Vogue, et la filiforme Victoria Beckham. Nos fringues de tailles 46/48 sont achetées en ligne chez Redoutable-Roubaix et ses chouchous… Tant pis, assumons-nous avec des épaules dénudées loin de la perfection, avec des jupes-style abat-jour qui mettent en relief – faute de les mettre en valeur – nos silhouettes galbées Louis XV.
Heureusement, reste un dernier subterfuge qui peut sauver l’été d’un naufrage total, c’est le… Oui, le … TATOUAGE !!! Il est vrai qu’un bras, une jambe, ou la naissance d’un décolleté habilement estampillés par des tatoueurs de plus en plus nombreux à Dijon et à la périphérie, ça détourne les regards de toute surcharge pondérale. Fastoche en plus, par rapport à un régime ou à des séances de gym intensives ! Ce sont eux les véritables rois des situations dramatiquement « kilographiques » ; ces grands manitous ont une dextérité luxuriante pour peaufiner les basiques « A toi Jules, pour la vie », pour se risquer de plus en plus à des cartoons sophistiqués, des fresques colorées, des graphismes multiculturels sur le terrain géographiquement accidenté de nos académies.
Hélas, allez-vous dire : « Je n’ai pas encore franchi ce cap » ! Rien de bien grave. Patientez jusqu’à la rentrée, où ce noble corps de métier des tatoueurs tiendra congrès à Dijon, les 8 et 9 septembre prochain. Minute papillon ! Avant de livrer votre personne à ces experts du dermographe, un brin d’histoire. Le tatouage, comme les scarifications, remontent aux balbutiements de l’humanité : ils constituaient un signe religieux, marquaient l’appartement au clan, à la tribu comme chez les guerriers Maoris, à une cité-état ou même à une société d’initiés. En Angleterre, sous le règne de la grande Elisabeth 1ère, les femmes de l’aristocratie portaient un tatouage sur le front, afin de se distinguer du peuple. Plus tard les membres des pègres russes ou chinoises, ou encore japonaises et siciliennes l’ont adopté (et l’adoptent encore) comme marque de reconnaissance, qu’ils sont les seuls à pouvoir décrypter. En somme, le tatouage tient lieu de carte d’identité secrète ou de passeport illicite imprimé sur la peau de ces individus de l’ombre, de ces passagers du crime ou de ces « moutons noirs » au regard de la bonne société…
C’est assez ubuesque de constater qu’une partie de la bergerie bébête des citadins fasse aujourd’hui tout un show avec l’exposition en plein-air de nombrils bardés de piercings ainsi que de tatouages. Est-ce pour le fun ? L’amour d’un certain art ? Pour jouer aux moutons de Panurge et suivre les estives des troupeaux de fashion victims ? A méditer sans modération, entre sable chaud et pin parasol!
Marie-France Poirier