Même si l’implantation d’un nouveau monument aux morts à Orgeux relevait d’une impérieuse nécessité, la commune a pris le temps juste et nécessaire pour porter un projet ambitieux qui a abouti à une œuvre remarquable signée Michel Couqueberg et inaugurée tout récemment par la Secrétaire d’État auprès de la Ministre des Armées. Une belle histoire d’art, d’histoire… et d’hommes.
Comme toutes les communes de France, Orgeux avait jusqu’à présent son monument pour honorer la mémoire de ses administrés tombés pendant les Première et Seconde Guerre mondiale. Un monument érigé en 1920 qui, au fil du temps, s’est avéré bien mal placé en bordure de l’axe principale de la commune, une route qu’il fallait barrer le temps des cérémonies. « Les voitures, parfois même des tracteurs ou des camions, étaient contraints de stopper, laissaient le moteur tourner et attendaient patiemment la fin de la commémoration. C’était devenu impossible. » explique Jean-Pierre Opplert, le maire élu depuis 2001. Pas franchement le lieu propice au recueillement…
A Orgeux, tout le monde est d’accord pour trouver une solution. Déplacer le monument ? La pierre est trop abîmée et risque de se fendre en cas de manipulation. En faire un autre à un autre endroit ? Mais où ? La réflexion commence à prendre forme. Et puis, Orgeux a la chance d’avoir unsculpteur animalier qui figure parmi les plus renommés de France : Michel Couqueberg. C’est donc tout naturellement, qu’en 2015, Michel Opplert va le voir pour évoquer le projet. L’artiste manifeste un réel intérêt mais il souhaite être mis en concurrence. Pas de confusion des genres.
6 600 € au total…
C’est là qu’une partie serrée commence pour Jean-Pierre Opplert : convaincre un conseil municipal quelque peu réticent à la réalisation d’un projet conséquent. « Combien ça va coûter, n’y a-t-il pas d’autres priorités ? » entend-on dans les réunions. Un budget est fixé : pas plus de 20 000 € tout compris ! L’appel d’offres est lancé. Quatre dossiers seulement reviennent car le faible budget dédié à cette opération d’envergure décourage les artistes les plus connus qui évaluent leur travail entre 50 et 60 000 € en fonction du matériau, de la hauteur et bien évidemment de leur cote. Michel Couqueberg, comme il s’y était engagé, a répondu. C’est lui qui est retenu. Il présente son projet et là, les élus n’en reviennent pas. Certains se pincent même tant ce qu’ils viennent d’entendre leur paraît improbable. Michel Couqueberg annonce qu’il fera cadeau de son temps, environ 140 heures de la conception à la pose. Seules les fournitures seront à prendre en compte. 6 600 € au total…
« A mon âge, 72 ans, on n’attend plus grand-chose » précise le sculpteur. « J’ai eu la chance d’effectuer un beau cheminement d’artiste. La commune m’a bien accueilli quand j’y ai créé mon atelier. Et puis, surtout, c’est aussi en mémoire de mon grand-père qui a fait le Chemin des Dames, à Verdun, et de mon père, résistant de la première heure pendant la Seconde Guerre mondiale
Je ne me voyais pas monnayer ces souvenirs qui auront été très présents pendant toute la réalisation du monument ». Il est comme ça Michel Couqueberg : un homme de coeur. Authentique.
40 ans de sculpture
Le monument a aujourd’hui trouvé une belle place dans le village. C’est ce qu’a convenu Geneviève Darrieussecq, la Secrétaire d’État auprès de la Ministre des Armées, présente en personne pour l’inauguration, entourée de 32 porte-drapeaux. C’était le 7 mai dernier. La veille de la commémoration de la victoire des Alliés sur l’Allemagne nazie. Chacun a pu apprécier la beauté du monument, « une des plus belles pièces qu’il m’a été permis de réaliser » ajoute Michel Couqueberg qui fête cette année 40 ans de sculpture. Un monument dont la symbolique évoque avec subtilité le voyage. Le voyage des hommes sur cette terre…
J-L. P