Les pourboires en question…

L’heure est au bilan pour la saison estivale 2017 en France et en Bourgogne. Celle-ci est perçue dans les milieux professionnels du tourisme et de l’hôtellerie comme « un plutôt bon millésime ». Les nombreux événements à portée nationale et internationale du printemps et de l’été (FIMU, Coupe Moto Légendes à Dijon-Prenois…) ou encore les étapes du Tour de France ont généré un surcroît de fréquentation. Bémol, les vacanciers regardent davantage à la dépense que dans les années 2010. Voilà qui engendre des conséquences tant pour les établissements que pour les employés des restaurants, hôtels ou cafés ! Hervé Becam, vice-président national de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH), affirme que les pourboires dans l’Hexagone sont en régression depuis quelques années : « Les Français donnent des sommes de moins en moins conséquentes ». L’UMIH réfléchit donc à une solution à proposer au législateur. Va-t-on et doit-on rendre obligatoires les pourboires dans l’addition du client, comme aux Etats-Unis ainsi que dans bien des pays de l’UE ? C’est la question que Dijon l’Hebdo pose à Patrick Jacquier, président de l’UMIH 21 et dont le groupe possède plus d’une dizaine d’hôtels en Bourgogne ainsi que sept restaurants gourmets et gastronomiques.

Patrick Jacquier : « Tout d’abord, j’aimerais préciser que cette tendance positive de la saison estivale concerne plutôt le haut-de-gamme. C’est vrai que les touristes ont été plus nombreux en Bourgogne et à Dijon. Je constate un retour de la clientèle asiatique et c’est une bonne chose… Ceci dit, il faut se montrer très nuancé dans l’éventualité de rendre obligatoire le pourboire ; et je tiens à apporter certaines précisions. Si la clientèle pratique moins l’usage du pourboire, c’est dû davantage à l’utilisation quasi généralisée de la carte bancaire qu’à une régression des budgets. Faute de paiement en espèces, on perd un peu l’usage du pourboire. C’est regrettable, alors que les services dans l’hôtellerie, la restauration ou les cafés sont l’objet de formation et de filières professionnelles pour lesquelles notre secteur a fourni et fournit encore de gros efforts. Ce sont là de beaux métiers dont la nature consiste à procurer du plaisir à la clientèle, à lui donner un maximum de satisfaction ; parmi les jeunes, je note que la plupart d’entre eux sont animés d’une véritable vocation. Il faut donc trouver le moyen de leur témoigner clairement la reconnaissance de leur travail ainsi que de leur professionnalisme. Comment ? Eh bien, en faisant apparaître dans l’addition le montant du pourboire, du « tip » comme le disent les Anglo-Saxons. A mes yeux, il est nécessaire de bien réfléchir au pourcentage demandé : 10%, 15% ? Tout ça mérite une analyse de l’ensemble des situations… Pour autant, je ne suis pas partisan de soumettre la clientèle à une obligation. J’insiste particulièrement sur cet aspect fondamental : il faut laisser à la clientèle la liberté de rémunérer le service rendu en fonction de son degré de satisfaction… N’oublions pas que nous sommes là pour offrir des services irréprochables, efficaces qui contribuent à un climat de plaisir et de détente ! Et ce, qu’il s’agisse d’un simple café de quartier à un établissement d’une catégorie 4 ou 5 étoiles. Une évolution se fait de façon très prononcée : les clients accordent de plus en plus d’importance à cette notion de service, d’accueil, qui est en passe de devenir essentielle, au même titre que la qualité d’un menu ou le confort d’une chambre d’hôtel. En un mot, je me résume : oui, pour faire figurer très lisiblement le coût des services dans la note, mais sans notification d’obligation à la clientèle. Laissons-lui le libre-arbitre, en fonction de son niveau de contentement ! »

Propos recueillis par Marie-France Poirier