Actualités du conseil départemental, primaires à droite, soutien à Nicolas Sarkozy, élections législatives, politique régionale… François Sauvadet, président du conseil départemental, fait un tour d’horizon sans concession pour ses adversaires de gauche et certains de ses « amis » de droite.
Dijon l’Hebdo : Lors de la dernière session plénière, vous avez annoncé que le Département allait adopter le dispositif « zéro chômeur longue durée » lancé par le député PS de Côte-d’Or Laurent Grandguillaume. Ce qui a fait réagir Colette Popard qui s’est montrée « ravie que vous reconnaissiez enfin les qualités d’un socialiste »… N’est-ce pas plutôt une pierre que vous lancez dans le jardin du PS dijonnais dont on sait qu’il n’est pas dans les meilleurs termes avec le député de la 1re circonscription ?
François Sauvadet : « Les socialistes dijonnais n’ont pas besoin de moi pour se déchirer. Nous avons unanimement reconnu que la proposition de loi Grandguillaume pouvait permettre de répondre à la situation difficile des chômeurs longue durée. Dès lors que je considère que c’est une bonne loi, je n’ai pas l’intention de faire de la politique politicienne. La commune de Longvic m’a proposé de l’expérimenter et le conseil départemental a décidé logiquement de s’impliquer dans la démarche. Je regrette que Dijon ne s’y soit pas associée… »
Dijon l’Hebdo : L’UDI n’a pas souhaité participé aux primaires de la droite et du centre qui ont retenu 6 candidats Républicains et un candidat du Parti démocrate chrétien. Faut-il en déduire que le centre se marginalise et qu’il pourrait être présent au premier tour de la présidentielle ?
F. S. : « J’ai toujours été clairement engagé pour que le centre participe à des coalitions avec la droite notamment, aujourd’hui, avec Les Républicains. J’ai plaidé au sein de mon mouvement pour que nous ayons un candidat au sein de cette primaire. Il n’y en a malheureusement pas. Jean-Christophe Lagarde, le président de l’UDI, et d’autres, se sont exprimés en faveur d’Alain Juppé. J’entends ici ou là des voix qui s’élèvent, parmi mes amis, pour dire qu’ils pourraient s’exonérer du résultat de la primaire pour peu que leur candidat ne soit pas qualifié. Cette attitude n’est pas responsable. Quand on dispute une rencontre, on se doit d’en accepter les règles et le résultat. Moi, je veux un changement. Je ne veux pas la reconduction de l’équipe socialiste. J’ai fait un choix de premier tour. Je l’ai rendu public : je soutiens Nicolas Sarkozy et je dis à tous mes amis du centre comme à tous ceux qui vont aller se prononcer, et j’espère qu’ils seront nombreux, que dès lors qu’ils participent à la primaire, ils doivent s’engager à ce qu’aucune voix ne manque au lendemain du second tour même si ce n’est pas leur choix qui est retenu. Sinon, nous risquons, à la présidentielle, un renouvellement de la gauche là où nous voulons une alternance ».
Dijon l’Hebdo : Et pourquoi Nicolas Sarkozy ?
F. S. : « C’est un choix de fidélité et de conviction. Je le connais bien. Ce n’est pas du tout celui qu’on présente dans les médias. Il a fait un travail d’évaluation sur son quinquennat. Il écoute. Il prend des décisions. Il a de l’expérience, de l’énergie, de l’engagement. On a mesuré son efficacité pendant la crise de 2008. Il a incarné une France forte dans un monde en plein mouvement. J’estime que quand on a accepté de participer à un gouvernement de la France pendant plusieurs années, quand on a été associé à la définition de la politique, je m’étonne qu’aujourd’hui on remette en cause des engagements que l’on a pris ensemble. Si, à l’époque, on n’était pas d’accord, il fallait le dire. Pour ce qui me concerne, j’ai assumé ma mission au gouvernement aux côtés de Nicolas Sarkozy. Je regrette que certains passent plus de temps à dénoncer et dénigrer ce qui avait été engagé plutôt que préparer les conditions de l’alternance ».
Dijon l’Hebdo : Et son discours sur les territoires vous plaît bien ?
F. S. : « Il nous faut une France réconciliée dans ses territoires. Il y a des fractures territoriales dont un certain nombre de candidats ne mesurent pas l’ampleur. Pas plus qu’ils ne voient la déshérence de territoires ruraux qui se sentent complètement abandonnés. Cette simple phrase de Nicolas Sarkozy, « si je suis élu, je mettrai à la fois un euro dans les villes et un euro dans les campagnes », témoigne bien d’un changement radical. Oui, il faut mettre un terme à cette vison « métropole » de l’avenir de notre pays. Je souhaite une France dans laquelle chaque habitant se voit un avenir. C’est le sens du combat de Nicolas Sarkozy qui a même proposé un plan Marshall pour l’avenir des territoires ruraux ».
Dijon l’Hebdo : La situation politique n’est pas simple non plus en Côte-d’Or et notamment sur la 4e circonscription où vous avez désigné Charles Barrière pour vous succéder. Une candidature que conteste le Républicain Hubert Brigand, maire de Châtillon-sur-Seine. Que ferez-vous si ce dernier va au bout de ses intentions ? Envisagerez-vous, dès lors, de présenter des candidats UDI sur les quatre autres circonscriptions du département ?
F. S. : « Je ne suis plus le président de l’UDI dans le département. Il faudra poser la question à Pascal Grapin qui m’a succédé et en qui j’ai totale confiance pour conduire le destin de l’UDI. Je n’ai pas choisi Charles Barrière mais je pense, en mon âme et conscience, qu’il a les qualités pour faire un bon député de la 4e circonscription. Rappelons-nous qu’il a conquis Is-sur-Tille de haute lutte. C’est un homme sérieux, attentif, disponible. Il a travaillé à mes côtés comme député suppléant pendant plusieurs années et il présente donc une belle expérience.
Hubert Brigand est un bon maire. Il a cherché à convaincre ses collègues Claude Vinot, Marc Frot, Georges Morin, de prendre acte qu’il souhaitait être le seul candidat aux dernières élections départementales sur le nouveau canton de Châtillon-sur-Seine. Tout le monde a joué le jeu sur sa candidature unique estimant qu’il était le mieux placé pour l’emporter. Conseiller départemental, il a souhaité être vice-président du conseil départemental. Il a pris des engagements auprès des électeurs en démissionnant de la communauté de communes pour assumer pleinement ses mandats, a-t-il dit. L’application de la loi sur le non cumul l’amènera à démissionner de la mairie de Châtillon et de la vice-présidence du conseil départemental. Aussi, je lui demande de tenir ses engagements et d’assumer les fonctions pour lesquelles il a souhaité être élu.
Maintenant, il n’y a pas de chemin en dehors de l’union. Prenons garde au Front national qui est en embuscade et à la gauche qui n’est pas morte contrairement à ce que l’on dit ici ou là. Je fais confiance à la sagesse d’Hubert Brigand pour, à terme, ne pas aller dans l’aventure d’une primaire ».
Dijon l’Hebdo : Lors d’une réunion départementale des Républicains, le sénateur Alain Houpert s’est montré très virulent à votre encontre. Quelle est votre réaction ?
F. S. : « Choqué. Je suis très choqué. Je regrette que des parlementaires se livrent à ce genre d’exercice là où le peuple attend de nous de l’engagement et de la dignité. Les querelles de personnes n’ont aucun sens et ne mènent à rien. Elles ne sont pas à la hauteur des enjeux et des défis. Quant à Alain Houpert, permettez-moi de vous dire que c’est un grand oiseau migrateur. Je ne suis pas le seul concerné. Quand je lis ce qu’il écrit sur Alain Suguenot et sur d’autres, je voudrais lui rappeler qu’on a une voix autorisée quand on a subi l’épreuve électorale. Et quand je vois le score qui a été le sien aux municipales à Dijon, franchement, il est plutôt mal placé pour donner des leçons de politique à qui que ce soit. Dans un contexte qui était, à l’époque, le plus favorable à l’opposition, il a fait le plus mauvais score à droite jamais enregistré à Dijon. Les situations imposent de la dignité dans les comportements ».
Dijon l’Hebdo : Avec vos collègues présidents des conseils départementaux de la région, vous avez créé l’Assemblée des Départements de Bourgogne Franche-Comté. Cela répond-il à une volonté de créer en quelque sorte un conseil régional bis sans les moyens mais avec une tribune que vous contrôlez ?
F. S. : « Pas du tout. Mme Dufay a gagné les élections. De justesse. Elle représente un tiers du corps électoral. Il ne faut pas qu’elle l’oublie dans la conduite des affaires de la région. Face aux complications de l’application de la loi NOTRe portant sur la Nouvelle Organisation Territoriale de la République qui confie de nouvelles responsabilités à la Région pour lesquelles il y a encore beaucoup d’incertitudes, l’idée a été d’avoir une structure d’échanges entre présidents de conseils départementaux. Echanges entre nos expériences pour avoir un dialogue construit, organisé pour faire remonter les préoccupations qui sont les nôtres dans le cadre des conventions que l’on aura à passer avec la Région. C’est plutôt une bonne nouvelle pour les habitants de Bourgogne – Franche-Comté de savoir qu’on travaille ensemble pour créer les conditions d’un service au public garanti comme c’était le cas avant l’application de la loi NOTRe que j’ai combattue et qui se révèle extraordinairement compliquée à mettre en œuvre ».
Dijon l’Hebdo : La gratuité des transports scolaires, par exemple, est au centre de vos échanges ?
F. S. : « Mme Dufay a affiché la gratuité des transports scolaires pendant sa campagne. Cette promesse est aujourd’hui présentée comme un objectif qui « sera mis en œuvre au terme du mandat ». En langage socialiste, ça veut dire que la gratuité n’interviendra qu’en 2021… Soit à la fin du mandat ! Marie-Guite Dufay a ainsi inventé la promesse de campagne qui s’imposera à ses successeurs. On apprend aussi que cette gratuité s’entend « hors frais de dossiers ». Toujours en langage socialiste, ça signifie très concrètement que les transports scolaires ne seront plus gratuits. Quel sera le montant de ces « frais de dossier » ? Par qui seront-ils payés ? Par les parents d’élèves ? Par les maires ? En Côte-d’Or, jusqu’alors, ces transports étaient gratuits… Quelle sera sa politique pour sécuriser les bus ? Pas de réponse… Si, elle nous dit qu’elle verra département par département… »
Dijon l’Hebdo : Comment vous sentez-vous dans votre rôle d’opposant au sein du conseil régional ? A voir et entendre les élus du Front national qui ont fait de vous leur cible privilégiée, on a l’impression que vous êtes finalement aussi important que la présidente Marie-Guite Dufay ?
F. S. : « Le Front national a toujours joué le jeu du PS… Je fais observer régulièrement à Mme Montel que ce n’est pas moi qui préside la Région au cas où elle l’aurait oublié. Elle ferait mieux de concentrer ses flèches sur l’inaction d’une présidente de Région qui, tout de go dans la presse, annonce qu’elle n’est pas pressée et qu’elle a le temps alors qu’il y a urgence économique, sociale, agricole. La loi lui a confié des compétences qu’elle doit assumer le plus vite possible. On a une région qui prend du retard et Mme Dufay en est toujours au stade de cafés-débats avec un projet de mandature qui arrivera peut-être à la fin de l’année, un budget qui arrivera peut-être au début du printemps prochain… On est dans le règne de l’inaction ».
Dijon l’Hebdo : Vous président, que feriez-vous à sa place ?
F. S. : « J’aurais appliqué clairement mon programme, sans perdre de temps. D’abord mettre en ordre de marche la machine administrative. Répartir clairement les rôles entre les deux anciennes capitales pour éviter les navettes incessantes que l’on voit aujourd’hui. Je n’aurais pas attendu plusieurs mois pour recruter un directeur général des services. J’aurais rapidement engager un dialogue avec les départements car on ne peut pas réussir sans eux. Je mesure que le chemin est encore long pour faire comprendre à Mme Dufay qu’il faut, à un moment, agir plutôt que réfléchir. Rappelons-nous qu’elle avait dit que tout avait été préparé en amont avec François Patriat et qu’elle serait à même de concrétiser la fusion dès le premier jour. Qu’est-ce qu’ils ont fait pendant ces deux années de préparation ? De la com… »
Dijon l’Hebdo : L’accueil des migrants est un sujet particulièrement complexe et suscite beaucoup de commentaires. Seriez-vous prêt à lancer un appel aux maires de Côte-d’Or pour qu’ils en accueillent ?
F. S. : « Ce n’est pas mon rôle. Le problème des flux migratoires, c’est d’abord la responsabilité de l’État et de l’Union européenne qui n’a pas su réagir et se mobiliser dans les temps. La réponse ne se trouve pas au niveau des départements et des communes ».
Dijon l’Hebdo : Le social est une des compétences du conseil départemental. En quoi la nouvelle revalorisation du RSA vous gêne-t-elle ?
Ce n’est pas cela qui m’ennuie. Le problème, c’est que les relèvements successifs du RSA se sont faits sans la moindre concertation avec les départements et sans compensation de l’État. Toute décision qui est prise en la matière nous impacte directement. Aujourd’hui, environ 10 000 personnes bénéficient du RSA en Côte-d’Or. Nous y consacrons 53 M€ avec une aide de l’État qui n’est que de 30 M€. Quand l’État prend une décision de solidarité nationale, il faut qu’il donne les moyens aux départements de l’assumer. On ne peut pas continuer de charger la barque quand, dans le même temps, on poursuit la baisse des dotations. D’où la colère légitime de mes collègues présidents de conseils départementaux. Ces baisses se traduiront, en Côte-d’Or, par un manque de 28 millions de recettes. 28 millions, ce sont 28 points de fiscalité en moins. C’est un choc énorme quand, dans le même temps, il nous faut prendre en compte l’augmentation du RSA, le vieillissement de la population, le handicap et les solidarités ».
Dijon l’Hebdo : Que pensez-vous de la proposition de Bruno Le Maire de contrôler les comptes bancaires des bénéficiaires du RSA ?
F. S. : « On peut toujours en rajouter dans la surenchère. Ce n’est pas une manière de lutter contre les fraudes. Nous avons été un des départements les plus engagés dans cette lutte en mettant en place une unité spécifique de contrôle en lien avec la caisse d’allocations familiales. Aujourd’hui, nous avons récupéré pratiquement 500 000 euros sur les sommes indûment versées à des personnes qui faisaient des déclarations frauduleuses. La préservation de la vie privée ne doit pas empêcher le contrôle ».
Propos recueillis par Jean-Louis PIERRE