Patrick Jacquier : « L’énergie que l’on dépense est souvent mal récompensée »

Les sujets qui fâchent, vous ne les avez pas occultés devant les adhérents de l’UMIH ?
Certainement pas. Une assemblée générale annuelle, c’est un moment de vérité et il n’était pas question d’éluder les points qui contrarient l’activité des hôteliers, restaurateurs, cafetiers et gérants de discothèques.
Ce ne sont pas les sujets qui manquent et les réactions qu’ils suscitent auprès des professionnels que nous sommes. L’énergie que l’on dépense est souvent mal récompensée. Cela démontre en tout cas, que le syndicalisme aussi nécessaire soit-il, est une chose bien ingrate à exercer, face, souvent à la non écoute, voire une certaine légèreté de nos dirigeants. La logique même d’entreprendre et de gérer nos affaires a terriblement changé en quelques années. Et nous ne maîtrisons malheureusement pas tout.

Vous avez donc adressé un message clair aux élus ?
Nous avons nos propres responsabilités, et en premier lieu la gestion de nos affaires.
Nos politiques ont les leurs aussi, c’est un fait. Mais nous sommes un syndicat, et nous devons vis-à-vis d’eux, avoir cette exigence de les faire nous écouter et de les voir nous associer plus directement et plus efficacement aux projets émergents.
A valeur d’exemple, je souhaite ainsi une bien meilleure concertation en matière de politique de la ville, avec la municipalité de Dijon sur le dossier de la Cité de la Gastronomie et du Vin. Idem pour la municipalité de Beaune pour la Cité du Vin. Idem pour la grande région Bourgogne Franche-Comté, qui mériterait de voir les acteurs de l’UMIH constituer une formidable boîte à idées pour tenter d’étoffer, de structurer, de hiérarchiser, les atouts culturels, environnementaux, patrimoniaux d’un territoire immense qui ne peut se contenter de vivre d’initiatives parcellaires… ce qui semble être le cas aujourd’hui.

Mais aussi à nos gouvernants ?
Chaque ministre qui se succède y va de son couplet pour essayer de rassurer les 220 000 entreprises françaises liées au secteur stratégique du tourisme.
Mais, si le rayonnement de notre ville, de notre région, de notre pays à l’international est incontestablement une priorité, il faut se donner les moyens de cette ambition.
Si le changement, c’est maintenant, la fiscalité doit être au service du développement de l’économique et pas l’inverse. La politique fiscale quant à elle doit envoyer des signaux clairs.
Même chose par le droit du travail, qui mérite indiscutablement une plus grande souplesse.
En fait, si nous gardons force et vigueur dans notre ligne d’action d’organisation syndicale représentative, nous nous devons, tous unis et solidaires, de revendiquer notre droit légitime de citoyens actifs à participer au débat.
Nous sommes des professionnels, et nous connaissons parfaitement nos métiers.
Nous connaissons aussi parfaitement, individuellement et collectivement, nos propres limites, mais une chose est sûre : c’est qu’au-delà d’éventuels désaccords, l’efficacité et la réussite d’un vrai dialogue, ne doivent laisser aucune place à l’amateurisme.
Et par voie de conséquence, nos politiques doivent être des experts et ne plus naviguer à vue.
Penser plus haut, monter d’un cran, voir plus loin,… appelez- ça comme vous voudrez, nous nous en sortirons tous, durablement, à cette condition exclusive, de voir le politique maîtriser ses dossiers et s’appuyer pour ses réflexions, non pas sur tout le monde (la sacro-sainte démocratie participative !), mais sur ceux qui sont référents, qui savent, et qui ont quelque chose à dire…
Au plan local, comme au plan national, l’UMIH est prête à relever le gant… au profit de la profession, de l’économie, et de l’emploi des jeunes. Encore faut-il qu’un véritable changement d’attitude s’opère…

Qu’est-ce qui vous contrarie le plus ?
Les dispositions réglementaires se sont amplifiées et figurent autant de contraintes.
Les attitudes et comportements de consommation aussi, qui nous obligent à une adaptabilité permanente aux tendances et aux modes.
La communication, et en particulier l’invasion du net et des réseaux sociaux qui viennent perturber nos marges, et le cas échéant nos images et nos réputations, est devenue une arme à double tranchant… qu’il nous faut absolument maîtriser.
On fait désormais des rois comme on les défait sans autre forme de procès, sans se soucier que derrière une entreprise il y a des hommes, des femmes qui travaillent dur, et qui peuvent se retrouver du jour au lendemain aux prises avec de grandes difficultés… quand ils ne disparaissent pas dans le plus pur anonymat.

La fusion des régions Bourgogne – Franche-Comté génère-t-elle beaucoup d’interrogations ?
La récente fusion des régions françaises est un élément essentiel qu’il nous faut prendre en compte.
– Quelle attractivité renforcée vont exercer demain ces nouveaux territoires, notamment en matière de flux touristiques ?
– Avec quels moyens allons-nous pouvoir agir sur eux ?
– Quel va être notre degré de concurrence avec les autres
régions ?
– Quels types de clientèle sommes-nous à même d’attirer ?
– Quelle sera notre valeur ajoutée ?
– Avec quelle offre ?
On le voit, c’est un vaste chantier qui s’ouvre…