Faut-il dénoncer l’extrême prudence du système bancaire ?

La Bourgogne Franche-Comté a un PIB légèrement supérieur à celui de la région Centre Val-de-Loire qui arrive en dernier dans l’hexagone, (excepté la Corse). Notre région se situe dans la moyenne nationale en matière de recherche ; la récente fusion offre des opportunités de se hisser plus haut encore dans ce domaine. Elle est également dotée de deux atouts de poids : tradition d’exportation forte – notamment dans l’industrie et l’agro-alimentaire -, taux d’emploi industriel le plus élevé de France (principalement sur l’axe Belfort-Montbéliard-Héricourt).
Des programmes concernant le haut débit et le développement de la fibre optique sont fin prêts. Il est urgent de les mettre en œuvre, afin d’accélérer l’essor des entreprises et de l’aménagement du territoire, et d’accroitre l’attractivité de Dijon – qui demeure la plus petite des capitales régionales de France. Pour compléter ce bref survol de l’économie, il convient de scruter le rôle de propulseur que peuvent jouer les banques sur l’échiquier régional.
Dijon l’Hebdo pose LA QUESTION à Jean-Pierre Deramecourt, président du directoire de la Caisse d’Epargne de Bourgogne Franche-Comté et du groupe « Prospective » du Medef Bourgogne : « En ces temps difficiles, il est de bon ton de dénoncer l’extrême prudence du secteur bancaire, son manque d’implication dans l’économie. Le financier de longue date que vous êtes récuse-t-il cet argumentaire ? »

Jean-Pierre Deramecourt : Je dois tout de suite préciser que la Caisse d’Epargne n’est pas une banque régionale comme les autres. Déjà, parce que le premier capital que les sociétaires investissent chez nous, c’est la confiance ! Nous prêtons de l’argent – environ 10 milliards et demi d’encours – qui participe à l’économie de Bourgogne Franche-Comté. Bien évidemment, nous nous fondons sur des dossiers jugés sérieux, qu’ils émanent d’entreprises, de collectivités territoriales ou locales, de particuliers, etc… Nous prêtons cet argent grâce aux dépôts qui sont effectués chez nous, sous différentes formes : comptes à vue, plan Epargne logement, livret régional, comptes à terme …

Le rôle des banques est de prendre des risques à la place des clients : celui de non remboursement, mais également le risque sur le taux qui s’apprécie mieux, lorsque l’on sait que nous prêtons en général sur du long terme, à taux fixe, alors que les dépôts effectués dans nos agences peuvent être de durée plus courte et à des taux qui peuvent remonter plus rapidement.
D’autre part, nous encourons des risques opérationnels sur l’argent déposé chez nous. Il nous est, par exemple, demandé de vérifier que rien ne provient du blanchissement d’argent. Enfin, notre mission consiste aussi à conseiller les clients en proposant les modalités d’épargne, de crédit, d’assurance et de service qui correspondent à leurs besoins, à leurs attentes.
Je tiens à aborder un autre aspect très important de notre activité et qui type notre spécificité de banque coopérative : nous sommes une banque de proximité ; nous n’avons pas d’actionnaires mais des sociétaires. Grâce aux parts sociales détenues par nos clients ainsi qu’à nos résultats, nous disposons de la solidité financière pour financer l’économie régionale. Nos sociétaires, dans le contexte actuel, se montrent très sensibles à cette activité, tout en réclamant un service bancaire moderne, compétitif.

Dans une telle perspective, je peux affirmer que nous sommes pleinement des acteurs économiques prospectifs : nous travaillons aux côtés à la fois de collectivités territoriales et des entreprises, mais aussi aux côtés des CCI, des agences de développement, des organismes représentant les entreprises sur tous les projets qui doivent faciliter le développement économique de nos territoires. Ainsi, nous avons travaillé avec la SEMAAD pour faciliter le développement de Crossject, un laboratoire qui fabrique des médicaments auto-injectables salvateurs lors de situations d’urgence vécues par des malades. Ce pôle pharmaceutique ouvrira dans le parc technologique de Mazen-Sully à Dijon. Ce n’est pas la première fois que nous nous associons à la SEMAAD ou aux collectivités locales pour conduire à bien ce genre d’actions. C’est ainsi que nous avons pu trouver une solution pour la Chocolaterie de Bourgogne, sauvant 180 emplois.
La Caisse d’Epargne n’hésite pas à pousser plus loin cette démarche de soutien aux entreprises en participant à leurs besoins en fonds propres. Et en l’occurrence, nous prenons tous les risques aux côtés des chefs d’entreprise, des créateurs pour soutenir des projets d’innovation et de haute technologie, des start’up. Cette implication dans l’avenir ne nous empêche aucunement d’être attentifs ou de soutenir des entreprises plus anciennes, traversant des difficultés passagères !
Dans le même ordre d’idées, nous pratiquons le microcrédit – attribution de prêts de faible montant – aux particuliers avec l’aide de nos administrateurs sociétaires. On constate ainsi que le mot accompagnement au développement économique et celui d’esprit mutualiste ne sont pas des concepts vides de sens, à la Caisse d’Epargne. »
Propos recueillis par Marie France POIRIER