La dysfonction érectile, un marqueur clinique de l’état de santé

« J’ai passé la quarantaine, je suis en surpoids, mon bilan sanguin montre un taux élevé de cholestérol, je fume un paquet de cigarettes par jour, mon père a une hypertension artérielle, et comme beaucoup de personnes le stress professionnel m’envahit. Docteur, depuis peu je n’ai plus d’érections, est-ce la conséquence de mon état de santé ? je suis très inquiet ! ».

L'identification épidémiologique des multiples facteurs de risque de la dysfonction érectile a facilité sa compréhension mais aussi modifié son approche diagnostique et thérapeutique tant à l'échelon individuel que collectif. L'intrication de facteurs organiques, psychologiques et environnementaux a permis d'introduire le concept de profil de risque. La dysfonction érectile est ainsi en train de s'imposer comme un authentique marqueur clinique de l'état de santé globale, c’est-à-dire, sexuel, physique et psychique mais aussi de la qualité de vie d'où le deuxième concept de dysfonction érectile "symptôme / maladie". Stricto sensu, la dysfonction érectile "symptôme" n'est qu'un phénomène subjectif révélateur d'un trouble fonctionnel. La dysfonction érectile est alors assimilable à une fenêtre qui s'ouvrirait sur de multiples et fréquentes situations à risques, surpoids, addictions, stress… et des pathologies chroniques, athérosclérose, diabète, dépression, iatrogénie…

L'enjeu étant la santé globale, ce concept met en avant l’intérêt d'un dépistage proactif, même si la dysfonction érectile n’est pas un problème pour le patient, car il peut révéler des pathologies méconnues ou de situations à risques, particulièrement cardio-vasculaires. Ainsi, la survenue d'une dysfonction érectile après 40 ans doit être considérée de principe et jusqu’à preuve du contraire comme un symptôme clinique d'atteinte cardio-vasculaire et peut-être d'alerte d’un accident aigu. La " dysfonction érectile maladie" se distingue de la dysfonction érectile "symptôme" car elle s'accompagne d'un mal-être, une souffrance. Dans ce concept de " dysfonction érectile maladie" l'important n'est pas tant le symptôme en lui-même, mais le rapport que chacun a avec son symptôme et la manière dont il l'exprime en sachant que cette souffrance se caractérise par une grande variabilité inter et aussi intra-individuelle notamment en fonction de l'âge et de la présence ou non d'une partenaire. Pour les hommes, la dysfonction érectile perturbe souvent leur personnalité affectant leur vie de couple, familiale, professionnelle.

Qu'elles soient cause ou conséquence, ces perturbations émotionnelles et psychologiques témoignent d'une souffrance souvent mal ou non exprimée d'où l'importance d'une prise en charge globale et non focalisée au seul organe, d'un réel dialogue médecin-patient. En pratique, en tant que marqueur pertinent de l'état de santé, la dysfonction érectile peut et doit être l'occasion pour l'homme, d'un bilan de santé globale incluant également une finalité de prévention et de promotion de la santé via un bilan étiologique raisonné et raisonnable fondé sur les données cliniques.

Dr Dany Jawhari
Médecin sexologue à Dijon

Secrétaire Général Adjoint de la Société Francophone de Médecine Sexuelle