Rémi Delatte : « Pour réussir en politique, il faut du temps et aimer les gens »

74,90 % au 1er tour en 2008… 78,83 % en 2014… Quelle est la recette de Rémi Delatte pour faire aussi fort dans sa ville de Saint-Apollinaire ?
Une élection municipale, c’est déjà une relation de confiance avec nos concitoyens. J’ai le sentiment aussi que c’est la reconnaissance d’un travail entamé depuis plusieurs années, dans la loyauté, avec détermination, pour servir l’intérêt public. J’ai écrit un livre, en 2011, dans lequel je dis que pour réussir en politique, il faut deux choses : avoir du temps et aimer les gens.

Quels seront les faits dominants qui vont rythmer votre nouveau mandat ?
Notre volonté est de rendre la ville toujours plus solidaire, harmonieuse, attractive et dynamique. Nous le ferons en poursuivant notre travail auprès des familles, de la petite enfance jusqu’aux aînés. Nous avons déjà donné une marque bien spécifique autour de l’inter-générationnel. Prendre en compte l’individualité de la personne et faire en sorte qu’entre jeunes et moins jeunes, puissent se développer des synergies. Saint-Apollinaire est une commune particulière dans le sens où elle est restée une commune rurale jusque dans les années 55. Le petit village est devenu une petite ville qui a su préserver son authenticité.
Nous avons un projet qui fait l’objet d’un recours au niveau du permis de construire et qui est la réplique de ce que nous avons déjà fait avec « Générations ». C’est un programme de logements, de services, destiné à un public porteur de handicaps, à des jeunes en difficulté dans leur parcours de formation, et également à des personnes âgées. De nombreux partenaires, comme la Mutualité, l’ADPEP, l’ADAPEI… toutes très impliquées dans la fragilité de la personne, nous accompagne dans ce projet.

Quel analyse faites-vous du résultat décevant de la droite aux municipales à Dijon ?
On aurait pu attendre mieux. Ce que je disais pour Saint-Apollinaire vaut aussi pour une grande ville. Il y a également cette relation privilégiée, de confiance entre le maire et sa population. C’est ce qui a prévalu au bénéfice de François Rebsamen. Il y a eu aussi, il ne faut pas le nier, des difficultés au sein de l’opposition qui a été trop longtemps divisée. La campagne, à droite, a pris du retard mais finalement Alain Houpert a réussi à rassembler tous ceux qui avaient eu des velléités de conduire une liste. La droite dijonnaise, même battue, a fait émerger des talents nouveaux qui vont se préparer aux échéances futures.

Vous pensez à votre suppléante à la députation, Anne Erschens, n° 2 de la liste de droite aux municipales à Dijon et qui a pris la présidence du groupe d’opposition ?
Anne Erschens, avec laquelle j’apprécie de travailler, est une personnalité issue du monde économique qui apporte des idées nouvelles en politique. Elle a cette capacité de rassemblement qui a permis de maintenir l’union. Elle a réussi à faire une belle équation entre ceux qui envisageaient de scinder l’homogénéité de l’opposition.

La récente séance d’installation du président et de l’exécutif du Grand Dijon a vu un fait nouveau : la création d’un groupe d’opposition dirigé par Emmanuel Bichot…
Il y a effectivement un groupe d’opposition qui s’est mis en place, composé de deux personnes sur 76 conseillers communautaires. Je pense que ces personnes ne connaissent pas bien l’histoire du Grand Dijon. Car le Grand Dijon a une histoire. Celle du District mis en place par six communes dont Saint-Apollinaire, où il y a toujours eu consensus entre les élus représentant les communes pour faire aboutir les projets dépassant les clivages politiques. Le fait d’avoir désigné les représentants au Grand Dijon par le suffrage universel tend à politiser le dispositif. Il ne faut pas casser cette idée d’un projet communautaire qui permet à l’ensemble des communes de tenir toute leur place, y compris au sein de l’exécutif.

Votre avis sur la suppression des Départements…
Tout le monde en parle. Est-ce qu’on va y arriver ? Je n’en suis pas sûr. J’observe que le Premier ministre ne supprime pas les départements, il supprime les conseils départementaux. On peut s’interroger sur l’énergie qu’il a dépensée pour modifier la carte des cantons pour finalement l’abandonner en 2021.
Aujourd’hui, on voit bien que l’on est en train d’organiser nos territoires autour de l’inter-communalité, autour des régions qui pourraient devenir de grandes régions. Je dis attention : il faut garder une vraie proximité. Celle qu’incarne la commune. Le maire, c’est lui qu’on sollicite pour régler un souci, quelqu’il soit. Le conseil général a une compétence en matière sociale qui nécessite une vraie proximité. J’ai du mal à penser que tout pourra passer par l’inter-communalité ou les régions. Ce que nous avions préparé en 2010 à l’initiative de Nicolas Sarkozy et François Fillon était remarquable de cohérence : on gardait les deux strates, départementale et régionale, on répartissait les compétences et on avait les mêmes élus ce qui présentait l’avantage d’en diminuer le nombre.

Vous pensez que la réunion de la Bourgogne et de la Franche-Comté va dans le sens de l’histoire ?
Il y a une dimension régionale qu’il faut revoir. C’est indéniable. Mais pour quoi faire ? Est-ce pour se comparer aux autres pays européens en dessinant des périmètres beaucoup plus importants que ceux que nous avons aujourd’hui ? Est-ce, au contraire, pour conserver cette spécificité française autour d’un maillage territorial très dense ? J’ai le sentiment que l’on cherche à rejoindre la taille des grandes régions européennes. On a besoin de se rapprocher, de développer des réseaux interactifs entre les différentes compétences des régions. Un exemple : les universités de Dijon et Besançon qui travaillent ensemble. Ce qui est en train de s’organiser m’intéresse. Tout comme la complémentarité qui existe entre les deux CHU. Fédérons, additionnons…
On a intérêt à ce que les initiatives émergent du terrain. Sinon, c’est Paris qui imposera ses vues.

Sur quoi travaille actuellement le député de la 2e circonscription ?
Je suis très impliqué sur le dossier du vieillissement. On parlait d’une loi sur la prise en compte de la perte d’autonomie. Je m’en réjouissais. Hélas, rien n’est sorti malgré tous les effets d’annonce. J’espère que l’on va avancer efficacement sur ce dossier qui suscite beaucoup d’attente. En tant que membre de la commission des affaires sociales, je prendrai toute ma part dans ces débats.

Propos recueillis par Jean-Louis PIERRE