Une élection peut-elle se jouer à un cheveu ?

La messe est dite. Les urnes ont livré leurs verdicts. On connaît nos maires depuis le 30 mars. On se remémore vaguement la tête qu’ils avaient sur les panneaux électoraux. Une tête est une partie du corps plus importante qu’il n’y parait. Vieil héritage grec car la tête est la concentration de l’esprit. C’est pour cela que l’on nous met en photo d’identité ou que l’on nous coupait la tête .
Pas de tête : pas d’esprit ! Les vaincus ont intérêt à se tenir à carreau. Et sur une affiche la tête d’un prétendant à la magistrature locale et suprême ne ressemble jamais vraiment à l’individu élu… comme nos photos d’identité ne nous ressemblent pas. Il y a quelque chose de figé et sans vie où l’image ne correspond pas au modèle que l’on pense. Donc exit l’imaginaire et le pouvoir de vie incarnée. L’image est glaciale, propre, type première communion où il ne manque que le brassard ou l’aube virginale. Cependant c’est avec cette tête-là que les candidats vont pécher nos voix.
Observez : François Rebsamen, Alain Houpert, Rémi Delatte, Jean Esmonin, Gilbert Menut, Patrick Chapuis et autres… On leur donnerait le bon dieu sans confession. Cependant, on aimerait les voir vivre ! Mais que nenni, un sourire tout au plus. Toujours nickel avec une coupe de cheveux donnant l’impression que leurs coiffeurs les suivent pas à pas, de jour en jour et cela depuis des lustres.
Leurs chemises sont repassées de fraîche date. Elles sont blanches immaculées ou à peine bleutées pour ceux qui veulent faire croire qu’ils ont fait l’ENA ou la magistrature. Leurs nœuds de cravate balladuriens ou type Taddeï font merveille. Quant à leurs vestes, elles annoncent le « costar » qui suit mais que l’on ne voit pas. En un mot, ils rassurent et assument une constance qui ne décevra pas. Marketing oblige. D’ailleurs, cela m’énerve un peu. On a le sentiment qu’ils ne vieillissent pas, eux. Désagréable pour nous pauvres électeurs prenant de l’âge (vous noterez la nuance).
Ceci dit, certains sortent du lot. Jamais la même image. Voyez Alain Houpert par exemple. Je le connais depuis plus de vingt ans. Avec son coté chien fou, ses cheveux toujours en bataille, la cravate tantôt baillante, tantôt fermée, la veste de guingois et la chemise sagement débraillée. Il faut reconnaître que le tout contraste singulièrement avec la photo officielle… Je veux dire la photo d’identité placardée. Est ce une rupture d’image ou plus exactement une suite de ruptures dans la constance ? Les cheveux surtout… Important les cheveux. Alain Houpert est le seul qui, à priori, n’était pas suivi par un coiffeur lui masquant par la brillantine l’épi revêche.
La coiffure fait l’homme politique, fait son style intemporel. Donc un élu qui ne maîtrise pas ses « tifs » ce n’est jamais bon.
Le vieux mythe de Samson et Dalila a la peau dure (pour mémoire : Samson, juge d’Israël, célèbre par sa force surhumaine qui résidait dans sa chevelure fut trahi par Dalila. Elle lui coupa n’importe comment ses cheveux et le livra à ses ennemis qui lui crevèrent les yeux. Ses cheveux repoussèrent et il reprit le pouvoir). Cela est toujours d’actualité. La coupe bien faite fait la force maîtrisée, un sorte de force tranquille encore une fois rassurante et permanente (pas indispensable que la théorie du genre lui impose une permanente, malgré tout.)
Bref, le pouvoir, les cheveux et le coiffeur ont toujours fabriqué une trilogie secrète mais efficace. C’est dans l’ordre d’une logistique à long terme . Les cheveux fous d’Alain Houpert avaient un coté sympathique et « marrant » dans la vie civile. Mais en politique , là où la constance est de rigueur, est ce qu’Alain Houpert avait un coiffeur ? Pas sur ? A vous d’avoir jugé… peut être ?

François NEDELLEC