Où en est la droite à Dijon ?

 

Voici une question qui trouverait volontiers place dans la célèbre émission de Julien Lepers sur France 3…
– Je pointe depuis 2001 au Pole Emploi de la politique dijonnaise.
– Je suis un ensemble disparate d’avis, d’amitiés, de vieilles complicités et d’inimitiés farouches.
– Je suis incapable d’oublier les rivalités de personnes.
– Je suis trop souvent inaudible, empêtrée, divisée et déchirée.
– J’ai avalé des couleuvres grosses comme des boas.
– J’aborde les élections municipales avec un optimisme et un enthousiasme pour le moins mesurés.
Qui suis-je ? Encore quelques précisions ? Inutile. Vous avez la réponse : la droite dijonnaise qui rêve de prendre sa revanche sur les humiliations de 2001 et 2008 mais qui redoute de vivre un troisième traumatisme en mars prochain.
Les déchirures d’hier ont imposé une lente rééducation. La droite a finalement compris qu’elle ne pourrait revenir qu’en prenant son temps et en respectant le rythme de sa convalescence. On comprend son envie de quitter le lit où l’a cloué, un dimanche soir de mars 2001, un congé maladie renouvelable, prescrit par François Rebsamen. C’est pourquoi la commission nationale d’investiture a décidé de s’en remettre à un vrai médecin pour soigner ses maux en désignant le sénateur Alain Houpert, radiologue de profession. Il n’y avait plus qu’à faire campagne. Tout paraissait simple… la droite, si longtemps divisée pouvait enfin se rassembler. Mais on sentait bien que la moindre étincelle était en mesure de déclencher un incendie généralisé. Or, nous l’avons vu dans le passé, les incendiaires ne manquent pas.
A l’origine du malaise, la rivalité qui oppose Alain Houpert à Emmanuel Bichot, UMP lui aussi, énarque de 45 ans. Ce dernier a abandonné ses terres nolaytoises où il exerce encore un mandat de conseiller gênéral pour tenter de livrer bataille à François Rebsamen. La commission d’investiture en a décidé autrement et a demandé aux deux « belligérants » de faire l’union. Mais pour discuter, encore faut-il parler la même langue. Et Alain Houpert propose la 25e place sur la liste qu’il est chargé de conduire. L’évidence s’impose : cette rivalité déclarée plombe d’entrée les minces chances de la droite car entre Houpert et Bichot, le poison de la défiance ne cesse de s’insinuer.
La politique se traite rarement en gants blancs. Il serait naïf de croire qu’elle ignore les coups fourrés et les embuscades : la détestation de l’autre y est plus répandue que l’amour du prochain. Le climat dijonnais s’envenime et ils sont un certain nombre à souffler sur les braises. Alain Houpert, qui ressemble à ces personnages que l’on croise dans la littérature romantique, dévorés par l’intranquillité, chassés de tous les lieux par une forme d’insatisfaction permanente, reste de marbre tant il croit être dans le sens de l’histoire. Les cafouillages dignes de cours de récréation s’accumulent au point de le menacer dans son statut de candidat « évident » qu’il croyait acquis. Mais ils sont un certain nombre à exprimer, à mots feutrés, les réticences que leur inspirent sa candidature. On l’a compris : avec des amis comme ça, on n’a guère besoin d’ennemis. Et en l’absence d’une personnalité incontestable capable de couper court aux petites rivalités d’ambitions et aux grandes manœuvres personnelles, il faut bien reconnaître que l’affaire ne se se présente pas forcément bien. La droite, en effet, continue de chercher une unité qui ne cesse de se dérober. Elle a compris qu’avant même que de s’épuiser elle-même, elle risquait d’éreinter son électorat qui se demande si elle parviendra à se sortir un jour du trou noir conceptuel dans lequel elle est tombée un soir de mars 2001.
Le problème de la droite dijonnaise, c’est qu’elle est encore trop dissonante et qu’elle ne laisse pas à son nouveau leader le monopole de la parole. Beaucoup de conseillers d’opposition y vont encore de leurs communiqués de presse, de réactions diverses et variées sur leurs blogs et/ou site internet. Ce qui, on en conviendra, est loin de montrer la belle harmonie qui devrait régner. Surtout quand des internautes « postent » des réaction peu aimables à l’encontre d’Alain Houpert et d’Emmanuel Bichot.
Aussi, l’arrivée, en ce début d’année, d’Alain Joyandet, ancien ministre UMP, pourrait enfin apporter une ligne claire car l’homme a toute la capacité de synthèse pour faire l’union et mener les bonnes manœuvres sur les vrais terrains qu’attendent les électeurs. L’ancien secrétaire d’Etat à la Coopération et à la Francophonie ne postule à aucune place sur la liste du sénateur Houpert. Il est là pour « donner un coup de main » comme il se plaît à le dire. Voilà plusieurs mois que les deux hommes étaient en pourparler. Son rôle sera d’apaiser les esprits les plus agités et de croire en une union possible entre Alain Houpert et Emmanuel Bichot et de donner des lignes claires pour le programme qui sera soumis aux Dijonnais. Car ce proche de Nicolas Sarkozy compte évidemment sur la dimension nationale pour bénéficier d’un vote sanction à l’encontre de François Rebsamen. La campagne électorale est enfin lancée à droite en même temps que la confiance peine à revenir. La sortie du labyrinthe est-elle proche ?
Jean-Louis PIERRE