Des troubles qui se soignent

Rien de pire pour une entreprise que des actionnaires défaillants. Pour la politique, c’est pareil. Rien de pire que des électeurs absents. La Ville de Dijon a trouvé un moyen de communication plutôt pertinent et amusant pour inciter à s’inscrire sur les listes électorales. Avec un simple jeu de mot, le tour (préliminaire) était joué : il faut combattre les troubles de l’élection, pouvait-on lire ces semaines dernières un peu partout en ville.
Eh oui, il en va en politique comme du sexe : plus on en parle, moins on pratique. Nous vivons un moment de verbalisation universelle où on laisse le mot se substituer à la chose au point de
l’escamoter, comme dirait le psy de ma femme. Mais au moment où la France est plus divisée que jamais, où l’ascenseur social est bloqué dans les étages, où les discours officiels ne cessent d’opposer les riches et les pauvres, les entrepreneurs et, plus généralement, ceux qui
réussissent et les salariés, les familles et les homosexuels, un peu de civisme ça ne fait pas de mal dans ce bas monde. Car il ne faut pas céder au mythe du citoyen apathique. Les électeurs ont déjà montré dans le passé qu’un scrutin mobilisateur pouvait les intéresser fortement.
Même si les municipales ne sont pas considérées comme des élections intermédiaires et encore moins d’élections de second ordre, les signes sont ténus, discrets mais convergents : les électeurs s’éloignent des urnes et il serait regrettable qu’à côté de l’abstentionnisme d’indifférence, toujours présent, l’abstentionnisme revendicatif constitue la base programmatique du premier parti de France.
En 2001, à Dijon, l’abstention était de 35,95 % et de 37,97 % en 2008. Qu’en sera-t-il en mars prochain ? Les inquiétudes liées à la crise économique seront évidemment entrées en écho avec la défiance politique des citoyens mais le peuple est censé détenir -à défaut de la vérité- du moins le bon sens. Alors, n’hésitez pas. Vous avez jusqu’à la fin du mois de décembre pour vous inscrire sur les listes électorales. Entre cette forme de démocratie de l’abstention et la démocratie d’opinion, avec sa kyrielle de sondages, tocades médiatiques, crépitement d’images, blogs et rumeurs, il y aura votre vote avec lequel, sans drapeau tricolore ni débordement d’enthousiasme, vous aurez clairement exprimé vos choix pour les idées qui vous sont chères, les luttes qui vous paraissent dignes et les hommes et femmes qui sont à vos yeux respectables…
Saviez-vous que les troubles érectiles concernent trois millions de Français. Les troubles de l’élection, eux, si l’on prend simplement le second tour de la dernière Présidentielle, en 2012, touchent trois fois plus de Français… Heureusement, dans un cas comme dans l’autre, ça se soigne.