Un déficit qui ne fait que se creuser, des passagers qui se font attendre… François Sauvadet n’a t-il pas eu raison, dans le contexte économique, de mettre un terme au financement de l’aéroport Dijon-Bourgogne ? N’auriez-vous pas été tenté, vous aussi, de faire l’économie de cet équipement sachant qu’il y en a un également -Dole-Tavaux- à 40 km de Dijon ?
C’est un débat qui dure depuis 25 ans. En 1985, je plaidais pour un aéroport Dole-Tavaux. A l’époque ni la mairie de Dijon, ni celle de Besançon ne souhaitaient un aéroport régional. J’en ai pris acte. Pour moi, l’aéroport de Dijon est fait pour accueillir des touristes et des industriels et pas pour aller vers des territoires ensoleillés.
Le pari n’est que partiellement réussi. Les 45 000 passagers de 2012 ont prouvé qu’il y a une aviation d’affaires qui rend service à nos décideurs économiques. La décision de François Sauvadet est brutale et surprenante dans la mesure où nous avions trouvé un accord pour sécuriser l’activité de l’aéroport.
Quand le Président du conseil général met en avant qu’il ne veut pas mettre en péril ses missions de solidarité et d’aménagement du territoire, il est dans une logique de choix financiers…
Le département de la Côte-d’Or n’est pas la seule collectivité à connaître des difficultés financières. Cela ne doit pas l’empêcher d’être cohérent. Il ne faut pas que tous les jours les Départements revendiquent l’exercice de toutes les compétences, notamment le secteur économique et, dans le même temps se comporter ainsi. Il y a là une contradiction. Que l’on prétexte aujourd’hui des difficultés pour abandonner en rase campagne des partenaires qui sont convaincus que l’aéroport est nécessaire au développement économique, c’est navrant.
Je rappelle que la seule collectivité dont la ressource baisse, c’est la Région qui n’a pas la compétence « avions ». Dans le Jura, c’est le Département qui assume Dole-Tavaux et pas la Région Franche-Comté. Si François Sauvadet confirme sa décision, il portera la responsabilité de la fermeture de l’aéroport.
Le projet Renaissance initié par Patrick Laforet, président de la CCI, prévoyait d’atteindre un trafic de 250 000 passagers annuels. 16 000 passagers seulement pour le premier semestre 2013, c’est quand même un peu mince…
Nous sommes restés dans le cadre de la loi. Il n’était pas question de soutenir des compagnies aériennes qui viennent un jour chez vous, prennent votre argent et ferment les lignes au moindre problème. Les contribuables bourguignons n’ont pas à financer les billets touristiques vers le Sud.
Les règles européennes n’ont pas été respectées à Dole-Tavaux. Le jour où la commission européenne fera tomber son couperet, il faudra rembourser les aides. La collectivité en cause devra alors faire face à de graves difficultés. Nous, on a fait le choix de la légalité.
Pour le gouvernement, la bataille sur le non-cumul des mandats est déjà gagnée. Pourtant, les opposants, parmi lesquels François Rebsamen, invoquent deux articles pour évoquer une éventuelle inconstitutionnalité de la loi. Vous y croyez ?
Je me suis toujours soumis aux règles de transparence et d’assainissement de la vie politique. Pourtant, j’ai voté l’amendement qui permet d’avoir deux mandats car c’est une disposition que je me suis toujours imposée. Depuis mes débuts en politique.
Le cumul, ce n’était pas une demande citoyenne, c’était une demande militante. Je regrette que les militants mettent en cause leurs élus en les accusant d’être des cumulards. Un parti qui joue contre ses élus prend de gros risques. Si l’inconstitutionnalité de la loi était prouvée, je m’en réjouirais.
Vous avez été deux fois ministre. Quel est votre avis sur le gouvernement Ayrault ? Quels sont ceux qui font le mieux leur boulot ?
[pullquote align= »right »]Ce gouvernement ne peut pas être populaire parce qu’il met en place des mesures que personne n’avait eu le courage de prendre avant lui.[/pullquote] Le gouvernement fait face à une équation incontournable : remettre les finances de la France en ordre pour ne pas la voir un jour dépendante du FMI. Ce gouvernement ne peut pas être populaire parce qu’il met en place des mesures que personne n’avait eu le courage de prendre avant lui. En Allemagne, Schroeder l’avait fait. Merkel en retire les fruits aujourd’hui.
Sur les ministres, je n’ai pas de jugement à porter. En dehors de mes amis qui gèrent l’Economie et les Finances, l’Education, le Commerce et l’Artisanat, et dont j’apprécie le travail, j’ai plutôt des interrogations à poser. Par exemple, sur l’environnement ou encore sur le fonctionnement du ministère des collectivités locales qui me déçoit parce qu’il ne clarifie rien et n’économise rien. Je m’interroge aussi sur la prise en charge des impayés de loyers, le tiers payant généralisé…
Est-ce que les gens peuvent comprendre que l’Etat Providence ne peut plus être ce qu’il a été ?
Vous serez candidat aux sénatoriales de 2014 ? Avec la réforme du scrutin, vous risquez de passer à la trappe ?
Je suis le mieux classé des trois sénateurs de Côte-d’Or. J’ai 70 % de présence à la commission des Finances. Je m’investi beaucoup et je souhaite rester sénateur. La réforme du scrutin (liste bloquée) pourrait ne pas être favorable. François Rebsamen a sa place. J’ai la mienne. Il faudra trouver une solution : il n’est pas question que l’un s’efface pour l’autre. Je ne souhaite ni asservissement ni affrontement. Je serai candidat dans une position éligible. Et pour être élu, il faut conduire une liste. La seule raison qui vaille pour moi, c’est le lien entre les élus et le territoire.
La Région va poursuivre ses efforts pour dépenser moins. Quels seront les secteurs concernés par ces économies ?
Toutes les collectivités de France sont aujourd’hui concernées par ces économies. Masse salariale, transports et lycées seront épargnés. Nous continuerons l’investissement qui est porteur d’avenir et réduirons le fonctionnement sans mettre à mal nos autres compétences. Les économies seront réparties dans tous les services. Elus et administratifs réfléchissent et continueront de réfléchir pour économiser intelligemment.
Le développement économique est une de vos compétences. Qu’est-ce que la Région peut faire de plus pour aider les entreprises ?
Nous ne sommes pas là pour créer de l’emploi. Nous sommes là pour créer les conditions d’emploi. La Région doit donner aux entreprises les meilleurs atouts pour réussir leur implantation et leur développement, c’est à dire des infrastructures, des équipements, de l’innovation, de la formation…
Serez-vous candidat à votre succession à la présidence du conseil régional ?
C’est ne pas moi qui décide mais on verra dans un an qui sera le mieux à même de la gagner. Dans tous les cas, et dans un contexte difficile, la Région peut être fière de son bilan.
Propos recueillis par Jean-Louis PIERRE